Il y a deux Post nous évoquions un temple bouddhiste, dans le dernier, un sanctuaire Shinto, chacun dans un lieu différent.
Cette semaine nous allons évoquer un temple et un sanctuaire qui se trouvent au même endroit et qui témoignent d'une particularité de la spiritualité japonaise :
la coexistence dans la société et dans le même lieu de deux religions, le Bouddhisme et le Shintoisme.
Le temple bouddhiste Senso-ji.
En 628, dans la rivière Sumidagawa (à proximité) deux pécheurs prennent dans leur filet une statue de la bodhisatva Kannon Ils la remettent à la rivière plusieurs fois, mais à chaque fois elle revient dans leur filet
L'endroit où la statue a été pêchée s'appelait "Asakusa-Ura" (la baie de l'herbe rase), probablement une zone marécageuse.
Le seigneur du village eut vent de cette histoire, et approcha les deux pécheurs. Il leur fit un sermon sur le bouddhisme si impressionnant que les deux pécheurs se convertirent immédiatement. Le seigneur du village transforma sa maison en un modeste temple pour y héberger la statue.
En 645 un prêtre bouddhiste construisit un temple pour y pour abriter plus dignement cette même statue. Il s'agit su Senso-ji.
Un bodhisatva est une personne qui a fait le voeu de suivre le chemin de Bouddha. Dans le cas présent il s'agit de la divinité qui symbolise la compassion et la bienveillance de tous les bouddhas. En sanscrit son nom est Avalokitesvara, et en chinois son nom est Gwaniyn.
Sur l'estampe Senso-ji se situe au premier plan. Une pagode de 5 étages et d'autres bâtiments sont présents sur l'estampe, et l'ensemble constitue le Kinryuzan, c'est à dire le temple du Dragon d'Or.
Cet ensemble a été détruit lors des bombardements de mars 1945 et reconstruit juste après guerre comme symbole de la renaissance du Japon dans la paix.
Ce sont les plus anciens temples de Tokyo.
Après les cerisiers en fleurs, on peut découvrir Asakusa sous la neige, dans une une estampe de Hiroshige III.
Le sanctuaire shinto: Asakusa-jinja.
En 1649 le Shogun Tokugawa Ieyasu, unificateur du Japon qui vient de s'installer à Edo (ancien nom de Tokyo) ordonne de construire un sanctuaire shinto (Asakusa-jinja) pour honorer la mémoire des trois hommes (les deux pécheurs et le seigneur du village) et les élever au rang de divinités, dans le plus pur respect des traditions "indigènes" japonaises.
On trouve ainsi une illustration de la capacité des Japonais à intégrer, transformer et reformuler des apports étrangers : une divinité bouddhiste est ainsi devenue le "prétexte" à faire de trois humains des divinités shinto.
A noter que le sanctuaire shinto est lui resté complètement intact lors des bombardements du 10 mars 1945 (voir Post sur tremblements de terre), alors que tout le secteur, y compris le temple Senso-ji a été détruit : les divinités shinto seraient-elles plus protectrices que les divinités bouddhistes ?
C'est un sanctuaire de plus petite taille que le temple.
Cet ensemble religieux reçoit 30 millions de visiteurs par an et serait à ce titre le monument spirituel plus visité au monde.
A travers cet ensemble de plus de 1400 ans, on a un exemple très caractéristique du syncrétisme japonais avec la coexistence et les influences réciproques entre une religion indigène (le Shintoisme) et une religion importée (de Chine et d'Inde), le bouddhisme : les troisièmes samedis et dimanches de mai, se tient la Fête des Trois Dieux, qui se déroule aussi bien dans le sanctuaire shinto que dans le temple bouddhiste.
La semaine prochaine, nous aborderons en étudiant les idéogrammes Asakusa, le développement de l'écriture japonaise. Encore une fois, nous illustrerons cette capacité japonaise à intégrer, à adopter tout en les adaptant des apports de pays étrangers: l'importation du système d'écriture chinois dans un système oral japonais.
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