L'estampe de Hiroshige présente Nihonbashi (point de départ du Tokaido), animé le matin avec le départ d'un Daimyo (seigneur) avec son escorte au milieu des citadins ordinaires.
La localisation de Nihonbashi est indiquée par le point rouge :
Et au milieu du pont se trouve toujours une plaque indiquant "Kilomètre zéro des routes du Japon". Ce point zéro a été instauré en 1604.
Jusqu'en 1935, le pont et ses environs étaient très actifs. Au pied du pont, se trouvait le marché aux poissons de Tokyo (qui déménagera à Tsukiji)
Nihonbashi aujourd'hui
Ce qui frappe sur la photo de Nihonbashi aujourd'hui c'est la présence écrasante d'une autoroute urbaine juste au dessus du pont (qui a remplacé en 1911 l'ancien pont en bois), mais pour préserver les lampadaires les deux chaussées ont été légèrement écartées.
Le pont "écrasé" par l'autoroute est un symbole de l'urbanisation à tout crin des années 60 sans aucune prise en compte de l'environnement ni du patrimoine.
Une anecdote : les autoroutes urbaines de Tokyo : un des plus grands massacres environnementaux de l'ère moderne.
A la fin des années 50, avec l'augmentation rapide du trafic automobile et des embouteillages, des projets sérieux d'autoroutes urbaines voient le jour.
Le Ministère de la Construction indique dans son cahier des charges :
«Lors de la sélection des emplacements des itinéraires, tenez compte de l'utilisation des terres dans les zones urbaines et évitez en principe les zones densément peuplées et utilisez des terrains, des rivières ou des canaux inutilisés».
Le choix se porte donc sur le projet qui présente le délai de réalisation le plus rapide, celui qui passe au dessus ou à la place de rivières existantes : aucune expropriation n'est nécessaire.
Toutes les rivières à l'intérieur du tracé rouge sont soit couvertes par l'autoroute, soit enterrées ou asséchées : plus d'une vingtaine de kilomètres de rivières ont ainsi "disparu".
remarque : la partie gauche "enclavée" est constituée par le Palais Impérial
Le premier tronçon (4,5km) sera ouvert en décembre 1962, et pour les JO de Tokyo 1964, ce seront 20 kilomètres qui seront opérationnels.
Aujourd'hui ce sont plus de 340 km d'autoroute urbaines qui existent dans la région de Tokyo.
En photos, le résultat actuel pour les rivières asséchées...
Le lit de la rivière Kaedegawa qui est devenu une autoroute :
ainsi que la rivière Tsukijigawa (on reconnait que les ponts surplombaient auparavant une rivière)
...et pour les rivières qui seront surplombées par l'autoroute :
La rivière Furukawa :
La rivière Kandagawa à deux endroits :
A proximité de la mer, se trouvent amarrés des bateaux de pécheurs (en blanc) et des bateaux de location pour des soirées dans la baie de Tokyo (couleur bordeaux)
Mais sur aucune photo, on ne voit de pêcheur...
Curieusement si il existe quelques projets pour enterrer les autoroutes à certains endroits (Nihonbashi, Ginza) à un horizon 2035/2040, on ne connait aucun mouvement écologiste (pourtant très nombreux et actifs au Japon) s'insurgeant contre la situation sanitaire des rivières.
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